Les Pionniers

Andrew Taylor Still (1828-1917), le fondateur de l’ostéopathie

Nous sommes au milieu du XIXème siècle, dans l’Amérique des pionniers. Fils de pasteur méthodiste qui pratique la médecine, Andrew Taylor Still apprend d’abord en pratiquant avec son père. Il commence sa formation médicale au Collège de Médecine et de chirurgie de Kansas City en 1848.

L’enseignement médical le laisse sceptique quant aux réelles possibilités de soigner efficacement son prochain.

À partir de 1851, il commence à mener cette activité de « médecin » itinérant au contact de la nature. Il dissèque des centaines de cadavres et acquiert ainsi une parfaite connaissance de l’anatomie.

En 1861-1865, c’est la guerre de Sécession. Au cours de cette période, il reçoit le commandement d’un régiment chez les Fédérés. Mais il s’attachera surtout à son activité de médecin et chirurgien militaire et à soigner les blessés. Ainsi ses connaissances de l’anatomie du vivant continuent à s’accroître. Il subira l’agressivité des milieux sudistes contre ses violentes prises de positions anti-esclavagistes.

En 1865, une épidémie de méningite cause la mort de quatre membres de sa famille, dont trois de ses enfants. Traumatisé par son impuissance face à la maladie, il dit vouloir soigner plus efficacement.

En 1874, il guérit un enfant de la dysenterie, pendant une épidémie, puis dix-sept autres avec succès.

Le 22 juin 1874, âgé de 46 ans, il rompt définitivement avec la médecine orthodoxe qui n’a jamais vraiment répondu à ses espérances et expose ses théories et résultats sur l’ostéopathie. Ce jour du 22 juin 1874, il dit avoir eu une vision, lui confirmant que l’homme avait été créé avec tous les fluides et tous les onguents lui permettant de s’auto-guérir : « Le corps est la pharmacie de Dieu ». Il établit alors les grands principes de l’art ostéopathique : « Je lance au vent la bannière de l’Ostéopathie! »
Et jusqu’en 1885, il guérit avec ses mains toutes sortes de maladies, même certaines qualifiées d’incurables, ce qui devient tout à fait inconvenant pour ses pairs.
Still exerce son art de manière itinérante et va acquérir une très grande renommée de l’État du Missouri à l’État du Kansas.

En 1892, The American School of Osteopathy est créé à Kirksville. C’est le premier collège américain d’ostéopathie mais aussi le premier établissement de ce type dans le monde. Il constitue la reconnaissance officielle de l’ostéopathie dans l’État du Missouri. Les étudiants qui y sont formés reçoivent le titre de « D.O graduate » (Docteur en ostéopathie) et non pas de M.D (Docteur en médecine), Still tenant, dès le départ, à faire la différence entre deux activités professionnelles totalement différentes.

Entre 1898 et 1900, Still publiera quatre livres afin de transmettre son message philosophique ostéopathique :
• Autobiographie (1897)
• Philosophie de l’ostéopathie (1898)
• Philosophie et principes mécaniques de l’ostéopathie (1902)
• Ostéopathie, Recherche et Pratique (1910).

Il se retirera ensuite de l’enseignement.

En 1914, il est atteint d’un ictus.
Le 12 décembre 1917, le « Vieux Docteur » meurt à l’âge de 89 ans.
Plusieurs de ses élèves ont pris la suite et ont permis à l’ostéopathie de se développer à travers le monde.

C’est à cette époque qu’un de ses élèves J. M. Littlejohn, originaire de Grande-Bretagne retourne à Londres fonder la British School of Osteopathy qui sera à l’origine de la naissance du mouvement ostéopathique en Europe.

John-Martin Littlejohn (1865-1947)

D’origine écossaise, John-Martin Littlejohn (1865-1947) reçoit une formation universitaire dans les domaines de la théologie, des lettres et de la médecine. Il émigre aux USA en 1892 et y termine ses études de médecine. Il vient consulter A. T. Still à Kirksville en 1892 pour des problèmes de santé chroniques et il est tellement émerveillé par le concept et la technique ostéopathiques, qu’il décide de devenir ostéopathe.
Il suit la formation au collège de Kirksville, tout en y donnant des cours de physiologie. Passionné de science, il se heurte bientôt à Still, que les expériences douloureuses passées avec la médecine de son temps rend très réticent à intégrer les progrès de la médecine scientifique naissante.

En 1898 il publie Lecture Notes on Physiology, en 89 Lecture Notes on Psycho-physiology. En 1900, il quitte Kirksville pour Chicago et fonde avec ses deux frères l’American College of Osteopathy, Medicine and Surgery. Cette même année, il publie Journal of the Science of Osteopathy, et Notes on the Principles of Osteopathy. En 1907, il rassemble ses cours et articles dans deux livres, Principles of Osteopathy, Theory and Practice of Osteopathy.

En 1913, il rentre en Europe et s’installe en Angleterre, projetant d’y créer une école d’ostéopathie. Avec l’accord reçu de Still de son vivant, Littlejohn crée la British School of Osteopathy (BSO) à Londres en 1917.
Elle restera la seule école anglaise jusqu’à la naissance de l’Osteopathic Institute of Applied Techniques à Maidstone.
Cette école est l’origine de tout un courant ostéopathique européen.

John Littlejohn a poursuivi l’œuvre de Still, utilisant les éléments apportés par le développement des sciences de base de la santé et de la médecine scientifique. Il a beaucoup insisté sur la relation de l’organisme vivant avec son milieu, affirmant que la santé est essentiellement la conséquence de l’harmonie de cette relation.

« Le grand principe de l’ajustement s’applique à la relation entre l’organisme en tant que tout et son environnement.
Rien de ce qui est amené au système de l’extérieur ne peut remplacer l’autosuffisance de l’organisme dont la capacité à se restaurer, se réparer ou à accepter l’apport de matériaux bruts est déficiente. »[1]

Il a particulièrement étudié les relations existant entre les différents niveaux de la colonne vertébrale et les organes du corps, ainsi que l’adaptation de l’homme à la verticalité.

[1] John Martin Littlejohn, Notes sur les principes de l’ostéopathie, p. 15.

W.G. Sutherland(1873-1954) et l’Ostéopathie Crânienne

Originaire du Middle West américain, W.G. Sutherland (1873-1954) a commencé sa carrière professionnelle comme journaliste.
C’est en tant que tel qu’il entend parler de l’ostéopathie au cours de l’année 1897. Les propos qu’il entend semblent tellement contradictoires qu’il décide d’aller au collège de Kirksville pour se rendre compte par lui-même. Il est particulièrement impressionné par ce qu’il voit. Le nombre de patients venant de toutes parts et la qualité des soins et des résultats obtenus, qu’il décide de devenir ostéopathe. Il commence sa formation en 1898 et reçoit son diplôme des mains même de Still en 1900. C’est au cours de ses études qu’il tombe en arrêt devant un spécimen de crâne semi désarticulé et qu’il est frappé par une étrange intuition : les agencements anatomiques des structures crâniennes semblent indiquer l’existence de mouvements entre elles: « Alors que je restais à contempler, tout en pensant, inspiré par la philosophie du Dr Still, mon attention fut attirée par les biseaux des surfaces articulaires de l’os sphénoïde. J’eus soudain cette pensée – comme une pensée guide – biseautées, comme les ouïes du poisson, indiquant une mobilité pour un mécanisme respiratoire. » Il appellera cette intuition : « L’idée folle. »